AES : Quand l'ordre public conditionne l'autorisation de séjour
Introduction
L’admission exceptionnelle au séjour (AES) est un dispositif complexe régissant la “régularisation” d’étrangers en France. Si les critères d'attribution sont multiples, l'ordre public constitue un élément déterminant lors de l’examen des dossiers.
Le rôle central de l'ordre public dans l'AES
L’expérience le démontre, la notion d'ordre public est interprété de manière extensive dans le cadre des demandes d'AES. Usage de stupéfiants, infractions vénielles : toute infraction est de nature à justifier, selon l’Etat, le refus d’une AES au motif d’une menace à l’ordre public. Les refus de titres de séjour pour ce motif explosent depuis l’entrée en vigueur de la Loi Darmanin.
En effet, comme le rappelle la Cour des comptes "tous les dossiers d'AES font l'objet d'une communication aux services de police ou de gendarmerie". Cette pratique systématique permet d'effectuer des vérifications approfondies sur les demandeurs.
Or dès que le nom du demandeur apparaît, irrémédiablement la sanction tombe : dans ce même rapport de la Cour des comptes consacrée à L’entrée, le séjour et le premier accueil des personnes étrangères, il est ainsi observé que "lorsque la personne est connue défavorablement, même pour des faits non jugés ou pouvant apparaître comme mineurs, la demande est généralement rejetée".
Conséquences et enjeux
Cette configuration soulève plusieurs questions :
Equilibre entre sécurité et droit au séjour : Jusqu'où peut-on aller dans la restriction des droits fondamentaux au nom de l'ordre public ?
Discrimination et profilage : Les critères retenus pour apprécier l'ordre public ne risquent-ils pas de conduire à des discriminations à l'égard de certaines catégories de personnes ?
Transparence et contrôle : Comment garantir la transparence et le contrôle de ces décisions administratives qui ont un impact significatif sur la vie des personnes ?
Conclusion
L'ordre public constitue un élément central dans l'évaluation des demandes d'AES. Si cette exigence est compréhensible dans un contexte de lutte contre la criminalité, il convient de veiller à ce qu'elle ne soit pas utilisée de manière excessive ou discriminatoire. OR tel paraît bien être le cas, tant il est vrai que les annulations d’OQTF et de refus de titre de séjour fondés sur ce motif sont courantes.